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Fatrasie

Fatrasie

Il faut bien que cette page soit, à un moment ou à un autre, noirci. Remplir des pixels blancs par les signes d’un noir profond, résolution, haute définition. L’angoisse qui se repend en rampant façon serpent – bifurcation au premier nœud de bois, l’intersection multiplie les lianes aux yeux vitreux. Les crocs sont élimés par les années, la chair entaillée. Le ventre plein de petits carrés bien alignés. Oh, mais computer ! Alors, ok ! Il faut que cette page soit noircie. Des lignes tracées dans l’urgence, l’indignité entre deux arrêts, deux vengeances, la prose en rut, débordantes et sous pression… Éjaculation.

Nul mystère sur l’intention de n’écrire que des mots à la file. Je ne pense pas qu’il n’y ait d’autres moyens pour déverser le pus accumulé. Les vitres sont encrassées par la suie de l’usine d’à côté. Avec un morceau de bois, par effacement, j’aime y tracer des signes et des symboles imaginaires, des sortes de runes, une écriture automatique, peut-être !?! Infection. Une buse s’envole, les plumes pleines d’œufs qui s’écrasent contre les strophes. Les terrasses comme des champs de mines. Dans les rues, ils voyagent affamés de brume éternelle. Qui ? Qui sont-ils ? Et si je pouvais te voir, voir ton visage tomber, la mâchoire dilatée, la bave du sacré. Ta présence est ancienne.

Les formes se déforment à chaque pas et pourtant, la démarche se fait de plus en plus féline, célébrée par de multiples gestes et quelques rugissements en silence. La combinaison est trop grande et les multiples couches de vêtements masquent une poitrine généreuse. Mon œil en surchauffe dévoile l’image ultime qui finira par s’échouer sous le crayon, un grand dessin rageur, des griffures de charbon d’un noir profond. Aucune chance d’avancer, de percer l’invisible, même à moitié déshabillée, les jambes serrées et la peur de ne plus pouvoir respirer. Il ne reste plus qu’à regarder la glaise couler.

Les formes se déforment à chaque pas et pourtant, la démarche se fait de plus en plus féline, célébrée par de multiples gestes et quelques rugissements en silence. La combinaison est trop grande et les multiples couches de vêtements masquent une poitrine généreuse. Mon œil en surchauffe dévoile l’image ultime qui finira par s’échouer sous le crayon, un grand dessin rageur, des griffures de charbon d’un noir profond. Aucune chance d’avancer, de percer l’invisible, même à moitié déshabillée, les jambes serrées et la peur de ne plus pouvoir respirer. Il ne reste plus qu’à regarder la glaise couler.

Je n’ai d’autre option que de me laisser aller à l’instant, cet instant présent loué par des gourous obsédés. Il faut bien que cette page soit, à un moment ou à un autre, noirci d’atrocités. Beaucoup de passage – les voyeurs intoxiqués, la pièce est infestée. Les aiguilles plantées dans des bras frêles, la peau tachetée de bleus violets, de fleurs tatouées. Et les os transpirent. Des cordes, des objets pointés et tout l’arsenal du plaisir débridé. Et maintenant, que vas-tu faire de ta proie ? Agenouillée, elle est à ta merci, le fondement offert, l’œil crevé. Les phantasmes surréalistes comme moyens de liberté. Un Christ lévite sur une croix dorée. Les barrières peuvent s’effondrer !

Le crépuscule s’est rependu sur les voies rouillées – un train fantôme, un murmure, une étreinte, probablement la voie lactée. Écrire un poème comme au Moyen Âge, volontairement incohérent, voir absurde, violent et délirant, mais aussi d’abord, mais d’abord tellement, tellement et pourtant, pourtant simplement tellement vivant.

— 21 juin 2024